La violence éternelle ?

La guerre entre le Hamas et l’armée israélienne éclipse provisoirement la guerre entre l’Ukraine et la Russie et efface complètement celle entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan… Demain, qui sait, un autre conflit viendra prendre le relais…

Au jour le jour, la chronique des guerres qui se succèdent semble donner crédit à l’idée d’une « violence éternelle ». Pire, un monde de plus en plus violent. Pourtant, quand on prend du recul, une tout autre vision des choses apparaît…

L’actualité internationale tient quotidiennement la chronique des conflits dans le monde : c’est son rôle. Mais le suivi quotidien de ces théâtres d’opérations rend mal compte des évolutions sur une longue période. Hier, le monde était-il plus en paix ? On a oublié que la décennie des années 1990 s’était ouverte avec la guerre du Golfe, suivie de la guerre en Yougoslavie, et le génocide du Rwanda.

Il y a 20 ans, dans les années 2000, il y a eu la guerre en Afghanistan puis la deuxième guerre en Irak (contre Saddam Hussein), la guerre du Darfour (300 000 morts !). Qui se souvient de la guerre entre Israël et le Hamas qui a eu lieu en 2008-2009 ? Les années 2010 étaient-elles plus calmes ? Non, elles étaient marquées par la guerre contre l’État islamique en Irak et en Syrie, la guerre au Yémen et celle au Soudan. Faut-il rappeler que s’est alors déclenchée une guerre au Mali qui a conduit à l’intervention des troupes françaises ? Si on veut prendre la mesure des évolutions sans se laisser éblouir par l’actualité, toujours sombre, toujours meurtrière, il faut prendre du recul.

Voici un tableau publié sur statista.com. Il concerne le nombre de victimes (civiles et militaires) tuées dans des conflits armés depuis la Seconde Guerre mondiale.

 

Ce tableau est édifiant. Des enseignements sautent aux yeux.

De 1990 a aujourd’hui le nombre de victimes est nettement moins élevé que durant la période précédante (de 1950 à 1980 ! Il y a donc une baisse de la violence armée depuis quatre décennies (sur un très long terme la tendance est plus significative encore).

La courbe d’évolution n’est pas linéaire, mais elle montre des cycles avec de brusques « poussées » et des périodes de déclin soudain. Les années 1970 ont été très meurtrières avec la guerre du Vietnam. Durant les années 1980, la guerre Iran-Irak a fait plus d’un million de morts (en jaune sur le graphique) et ne dure que quelques années.

Ces conflits sont localisés dans certaines régions du monde : le Moyen-Orient et l’Asie. L’Europe et les Amériques sont épargnés (en nombre de victimes).

Premier constat global :  si les conflits guerriers ne cessent effectivement jamais, le monde n’est pas à feu et à sang. Il existe plutôt des foyers guerriers, très localisés dans le temps et l’espace, dans un monde globalement pacifié : 98% des États de la planète vivent en paix[1].

Le suivi quotidien de l’actualité – avec ses images de conflits, bombardements, tueries, crimes de guerre – donne une image fausse de l’état du monde. À cela s’ajoutent d’autres biais de jugement : une guerre en efface une autre (et on finit par l’oublier). Certaines sont très médiatisées alors que d’autres restent dans l’ombre. En ce moment même, une guerre a lieu au Soudan (elle a débuté le 15 avril 2023) dont personne ne parle. Elle a déjà fait des milliers de victimes et un déplacement de plus d’un million de personnes.

Faut-il le redire ? Non, le monde n’est pas de plus en plus violent. L’actualité quotidienne nous informe sur quelques conflits en cours mais elle nous donne une image très déformée de l’état du monde.

1) Ou plus exactement leurs populations sont éloignées des conflits.

 

 

6 réactions sur “La violence éternelle ?

  1. si les hommes progressaient vraiment est à mon avis la phrase à retenir, et a méditer,
    alors oui au lieu de fermer la radio remettons en cause nos propres capacités à vivre ensemble, et a penser l’autre à l’aune des mouvements planétaires qui se profilent, à cause des guerres mais aussi et surtout à cause de la planète

  2. Si la récurrence de la violence est étalée dans le temps avec un rythme de 20 années qui séparent deux conflits , il n’en reste pas moins que les moyens militaires sont de plus en plus puissants et destructeurs. Il y a les effets immédiats et les effets de long terme sur les population qui
    y échappent mais ne sont pas certainement saines et sauves pour autant. Il n’est pas possible de banaliser la guerre! Il n’est pas question de la rendre excusable, justifiable. Si les hommes progressaient vraiment ,ils devraient trouver en eux et avec les autres les arguments et moyens pour ne plus la faire du tout, nulle part!!!!

  3. IL me semble que le nombre de victimes dues aux conflits armés dans le continent Afrique est fantaisiste, il ne reflète absolument pas la réalité. Les sources exploitées ont beaucoup de lacunes à mon avis.

  4. En 1970 nous etions 3,7 milliards sur terre. Un calcul proportionnel serait intéressant…
    Merci pour vos articles !

  5. Je me demanderais si l’attaque du hamas ne serait pas une occasion en or offert à l’israel et son allié eternel les etats unis pour regler son compte à l’iran sur sa velleité de se doter de l’arme nucleaire

  6. Merci de nous rappeler que l’on peut, et l’on doit, prendre du recul… ce qui ne veut pas dire se désintéresser ou plonger dans la fatalité. Pour rester actif, et non passif et défaitiste, comme nous y encouragent de nombreux médias, votre article nourrit… mieux que d’éteindre la radio quand ils commencent à parler de choses désagréables…

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