Connaissez-vous Florence Nightingale (1820-1910) ? Cette Anglaise est moins connue que ses contemporaines, les sœurs Brontë ou la reine Victoria (1819-1980). Pourtant, son apport à l’humanité est sans commune mesure avec elles.
Florence Nightingale est la fondatrice de la profession d’infirmière.
Née au sein de la grande bourgeoise britannique, elle a reçu l’éducation type d’une jeune fille de bonne famille – littérature, piano et couture – et tout la destinait à devenir épouse modèle. Mais elle a fermement refusé ce destin tracé pour elle et repoussé les « bons partis » qui se présentaient à elle pour se consacrer à sa vocation : les malades. Cet appel relevait quasiment de la mystique : « Mon esprit est obsédé par la souffrance humaine, elle m’assaille de tous côtés. Je peux à peine percevoir autre chose. »
À l’âge de 20 ans, elle part en Prusse dans un institut de diaconesses qui forme les gardes-malades. À l’époque, ce travail est très dévalorisé et son choix scandalise sa famille. De retour d’Allemagne, ses relations familiales lui permettent de prendre la direction d’une clinique privée à Londres. Son objectif : faire de l’activité d’infirmière une vraie profession.
Quand, en 1853, débute la guerre de Crimée(1), Florence s’engage pour venir en aide aux soldats blessés. Dans la caserne Selimiye à Scutari, elle impose de nouvelles règles sanitaires : aérer les salles où vivent les malades, changer leurs draps, laver leurs vêtements. Ces principes d’hygiène qui nous paraissent élémentaires ne l’étaient pas à l’époque. Le mouvement hygiéniste commençait tout juste à s’imposer dans les milieux médicaux. Florence a dû batailler contre le corps des médecins qui voyaient d’un mauvais œil la prétention d’une jeune femme à régenter la vie de l’infirmerie de la caserne. Elle se préoccupait aussi du bien-être des malades (et pas simplement de leurs blessures) : être propre, manger de bons repas (elle fit embaucher un cuisinier français) faisait selon elle partie des soins. Et rapidement, les résultats ont payé.
Le travail de F. Nightingale a suscité un grand écho en Angleterre. Les reportages de guerre la présentent comme une héroïne, mais la jeune femme, peu sensible à la notoriété, met surtout à profit ses contacts dans l’élite anglaise pour faire progresser sa cause. De retour en Angleterre, elle rédige un épais rapport destiné à la Commission royale pour la santé dans l’armée. On y trouve des observations détaillées, quantité de données statistiques et des recommandations pour les soins. Son rapport eut une grande influence pour réformer l’approche de la santé dans l’armée (même si en tant que femme, elle a été écartée de la commission).
Bien que souvent malade et alitée – elle a contracté la « fièvre de Crimée » et souffre de fatigue chronique –, elle continue sans relâche son combat pour les soins infirmiers.
En 1859, elle fait paraître un petit recueil, Notes on Nursing (Des soins à donner aux malades), qui constitue le premier manuel de soins infirmiers et connaît un grand succès.
En 1860, elle fonde au St Thomas’Hospital, la première école d’infirmières et de sages-femmes. Elle y recrute des jeunes femmes éduquées, capables de suivre des cours médicaux, comprendre les maladies et prendre des responsabilités de soignante.
Sa réputation ne cesse de s’étendre dans le monde entier : Linda Richards fondatrice d’écoles d’infirmières aux États-Unis et au Japon la prend pour modèle. À sa mort, en 1910, les infirmières sont devenues de vraies professionnelles du soin et non plus de simples auxiliaires gardes-malades.
Un siècle plus tard, le métier d’infirmière est une profession reconnue et incontournable, mais le combat de Florence est loin d’être terminé. La crise du Covid 19 a mis au premier plan le rôle essentiel des personnels soignants. Leur implication et leur importance auprès des malades ne sont plus à démontrer, mais le métier souffre d’un déficit de moyens et de reconnaissance. En France, le « Ségur de la santé (2020) a revalorisé les salaires des personnels infirmiers (qui sont désormais dans les normes européennes), mais il reste encore beaucoup à faire pour améliorer les conditions de travail.
Dans le sillage de Florence Nightingale, certains représentants de la profession préconisent de faire évoluer les compétences des infirmières en leur donnant plus de prérogatives médicales : notamment établir des diagnostics et faire des prescriptions, ce qui redistribuerait les rôles avec les médecins. Rappelons qu’il fut un temps où les infirmières n’étaient même pas autorisées à faire des piqûres ! D’autres aspirent à la création de véritables « sciences infirmières », ayant pignon sur rue dans le monde académique. Le combat pour la valorisation de la profession d’infirmière, qui restera toujours un des plus beaux métiers du monde, est toujours d’actualité.
(1) Qui opposa les armées française et anglaise aux armée russes.
Bonjour,
Une information est erronée: la première école laïque de soins infirmiers a été fondée une année avant celle de St Thomas’Hospital, en 1859 par la Comtesse Valérie de Gasparin à Lausanne (encore active, voir Institut et Haute École de la Santé La Source). Cela n’enlève rien aux mérites de cette femme révolutionnaire et à sa place centrale dans l’histoire des soins.
Merci pour cette information ignorée de moi. Vous confirmez un point important qui concerne la plupart des innnovations sociales (ou techniques) elle ne sont jamais complètement isolées et originales.
Bonjour,
J’ai eu la chance de suivre la formation d’infirmière à l’école Florence Nightingale de Talence prés de Bordeaux dans les années 1962 1964.Pendant toute ma carrière d’infirmière,de puericultrice de cadre de santé ,enseignante,j’ai mesuré la chance que j’avais eu de poursuivre des études dans une telle école.Les techniques enseignées,les valeurs dispensées ont fait de ces 40 années à soigner ,à enseigner une veritable passion,je me suis toujours sentie digne de Florence Nightingale
Sa lampe n’aura pas céssé de m’éclairée moi aussi !!!