Narcisse Pelletier est un jeune marin de 16 ans qui est embarqué un jour le 1857 sur un navire destination de Sydney. Arrivé sur la côte australiennes, son navire a fait naufrage. Rescapé, le garçon se retrouve sur une île où un aborigène le repère et l’emmène dans sa tribu. Il va y rester 17 ans de 16 a 31 ans. Narcisse a appris la langue locale, il a participé à la vie quotidienne des Uutaalnganu, qui vivent alors de pêche et de chasse.
Comme tous les hommes adultes, il a été « initié », c’est-à-dire introduit dans la confrérie des membres de son clan. En témoigne les scarifications qu’il portait sur son torse ainsi que les piercings qu’il portaient au nez et à l’oreille droite.
Puis un jour, des marins britanniques débarquent sur l’île et repère ce blanc parmi les aborigènes. Le croyant prisonnier, ils le font monter à bord et le ramènent avec eux. De retour en France, Narcisse devient une célébrité. A Nantes, Constant Merland, docteur et savant local publie son témoignage : Narcisse Pelletier : dix-sept ans chez les sauvages.[1]
Ce récit effectivement exceptionnel car Narcisse a vécu dans une tribu « non contacté » bien avant l’arrivée des colons et des ethnologues.
Ce témoignage confirme l’existence des nombreux conflits violents entre groupes aborigènes. Narcisse a lui-même participé à douze batailles. Les motifs principaux de ses conflits sont des femmes. Il arrive qu’un homme enlève une femme d’un clan (voisin) à l’aide de ses proches. Le mari de la kidnappée rassemble alors ses alliés et la petite troupe (qui peut regrouper de 50 à 80 personnes), part récupérer la jeune femme, armes en mains. La bataille se déroule ainsi. Dans un premier temps, les groupes restent à distance et s’insultent. Puis les lances sont jetées. Il n’y pas vraiment de corps à corps. Quand un groupe est en difficulté, il prend la fuite. Il n’y a pas de prisonniers, les blessés sont achevés sur place.
Contrairement à l’idée romantique du bon sauvage, entretenue longtemps par les études ethnologiques, les Aborigènes d’Australie, n’étaient donc pas de paisibles chasseurs-cueilleurs, ignorant les conflits guerriers. La violence organisée existait bien chez eux, elle avait simplement été ignorée ou édulcorée.
Christophe Darmangeat a entrepris un travail de recueil systématique de toutes les données sur les conflits guerriers entre aborigènes avant la colonisation. Il en a tiré un livre « Justice et guerre en Australie aborigène (éd. smolby, 2021) dont le bilan est sans équivoque : la guerre était bien présente sur chez les Aborigènes. Elle n’était ni exceptionnelle, ni réduite à des escarmouches ritualisées : elle faisait partie intégrante de la vie des tribus.
Pour combattre, les Aborigènes utilisaient leurs lances ou boomerang de chasse, mais fabriquaient aussi des armes de guerre : boucliers, massues, lances dentelées.
Les raisons de leurs conflits relevaient principalement du droit de propriété sur les femmes : le rapt d’une jeune fille (avec ou non consentement), la promesse non tenue par les parents de donner leur fille à un homme (et finalement livrée à un autre), l’adultère, etc. Les querelles autour des femmes concernaient deux conflits sur trois. L’autre raison relevait des accusations de sorcellerie : si un homme est mort de façon suspecte, on supposait qu’un sort avait été jeté. Ce qui appelait vengeance.
[1] Réédité sous le titre « Narcisse Pelletier : Naufragé Aborigène » Au vent des Iles, 2021,
A lire aussi dans l’humanologue :
• Les deux naissances de la guerre.
• Aborigène, un secret dévoilé.
Attention aux fautes d’orthographe et de français: « ceux qui ne se sont pas pu fuir sont achevés ».
Je conseille à l’auteur de cet article de lire avec attention « Au commencement était… » de David Graeber et David Wengrow, une nouvelle histoire de l’humanité pour être moins superficiel.